Kaamelott fait partie de mes séries coup de cœur. Qu’il s’agisse des premières saisons très sketchs, des suivantes plus narratives ou des dernières plus sombres, j’ai accroché à l’univers, aux personnages, à l’écriture, à l’humour, bref, à peu près à tout. Et lorsque le Livre VI s’est achevé en 2009, j’attendais avec impatience le moment où « Arthur sera de nouveau un héros ».
Et pourtant, en 2021, j’ai mis « Kaamelott : Premier volet » dans mes déceptions cinématographiques de l’année tant il y avait des choses que je n’avais pas aimées au niveau de l’histoire, de l’évolution des personnages, du rythme, etc.
Un peu plus de 4 ans plus tard, la suite débarque enfin sur les écrans et c’est avec une certaine méfiance que je m’y suis rendu…
Présentation
Quelques mois après les événements du film précédent, Kaamelott est en ruines et Arthur (Alexandre Astier) vit désormais en Carmélide, dans le château de ses beaux-parents (Lionnel Astier et Joëlle Sevilla).
Un appel aux différents chevaliers et aspirants est envoyé pour former une nouvelle table ronde et différent groupes finissent par se former pour partir vers différentes quêtes pour montrer leur valeur et peut-être se rapprocher du Graal.
Mais les menaces rodent toujours avec un Lancelot du Lac (Thomas Cousseau) revanchard, une menace qui semble venir d’Orcanie mais également des signes divins qui mettent en garde Arthur.
Le film est sorti au cinéma le 22 octobre 2025
Critique
Par quel aspect vais-je donc commencer ? Mon premier grief est déjà dans le titre : « Partie 1 ». Je l’avais déjà dit pour « Spider-Man : Across The Spider-Verse » en 2023, je n’aime pas les « demi-films ». Même si un film ne fait que planter les graines d’une intrigue plus longue, je vais au cinéma pour en sortir avec une forme de complétude à la fin, avoir le sentiment que même si tout n’est pas terminé, on tourne déjà une première page, on a réellement avancé vers quelque chose. Ce n’est pas le sentiment que j’ai eu en sortant de la salle.
Et c’est quelque chose qu’Alexandre Astier sait faire, il nous l’a prouvé avec le Livre VI de la série, où chaque épisode, de 45 minutes déjà, est une porte vers le suivant mais se contient narrativement pour réellement raconter quelque chose.
Ici, on se retrouve face à une introduction de 2h19 (!) dont l’intrigue, s’il fallait la résumer, serait de parler de débuts de multiples sous-intrigues, sans qu’aucune n’ait une conclusion ni même un réel moment pivot, le film s’arrêtant pour toutes les aventures sur le moment où l’élément modificateur va enfin (peut-être) leur donner de l’importance. Et, même en sachant dès le début que c’est « une partie 1 », j’osais espérer que le film puisse se tenir en lui-même, ce qui n’est pas le cas.
Et cette multiplicité des sous-histoires fait aussi partie des choses que je reproche au film. Un peu sur le fond, surtout que certaines ne sont pas des plus passionnantes, mais surtout sur la forme.
Le fait de passer d’une scénette à une autre ne fonctionne pas aussi bien au cinéma que pour de courts épisodes de série. D’autant qu’ici, dans certains cas, on arrive sur une petite scène de 2 à 3 minutes qui n’apporte rien à son aventure, qui au mieux comporte un trait d’humour et on repart vers une autre.
Et même si je peux aimer parfois les films chorals, ici, on a trop de personnages, trop de trucs (parfois insignifiants) à raconter, trop de tout.
Le « Premier Volet » avait déjà amené son lot de nouveaux personnages, parfois dispensables, mais le casting s’agrandit encore ici. Petit exemple. Astier fait le choix de faire revenir Clovis Cornillac et Guillaume Gallienne pour les envoyer en mission d’espionnage (on va passer sur la faiblesse scénaristique de faire travailler ensemble des chasseurs de prime rivaux sur une mission qui ne correspond pas à leur travail habituel juste parce qu’on a pas trouvé d’autre raison pour faire revenir des guests). Mais il faut en plus leur adjoindre un troisième chasseur (joué par Redouane Bougheraba) qui arrive de nulle part juste pour le plaisir d’avoir un personnage qui n’apporte rien, si ce n’est l’une ou l’autre réplique un peu amusante mais facultative. Vouloir faire venir l’acteur, pourquoi pas mais alors dans ce contexte scénaristique, on fait de lui un véritable espion (accompagné ou non) au lieu de tordre des personnages pour les faire entrer dans une histoire.
Et on peut dire la même chose avec d’autres nouveaux ou des personnages qui sont arrivés dans le film précédent mais qui n’ont déjà plus rien d’intéressant à raconter (comme Trévor, juste là pour « buter son frère », sans raison). D’autant que l’abondance de personnages, dont des nouveaux, donne moins de temps d’écran global aux autres qui jouent parfois un rôle majeur (comme Guenièvre, toujours par l’excellente Anne Girouard) et qui se retrouvent à ne pouvoir glisser que l’une ou l’autre réplique sur toute la durée du film. Heureusement, il y a tout de même moins de scènes « faisons apparaître un personnage connu pendant 10 secondes » que pour le premier volet et les rares fois où ça se produit, c’est moins choquant car bien plus intégré scénaristiquement, comme les apparitions de Christian Clavier ou Alain Chabat.
En parlant de personnages, il faut bien mentionner un peu ce qui concerne les remplacements et absences.
Anna de Tintagel, demi-sœur d’Arthur, est désormais interprétée par Virginie Ledoyen. Il faudra en voir plus dans la suite mais on a l’impression d’être face à un personnage totalement différent de celui joué par Anouk Grinberg jusqu’ici. On avait une méchante froide et cruelle, avec un ton si particulier et menaçant pour toutes ses phrases qui est ici remplacée par ce qui ressemble pour le moment à un cliché de méchante de film Disney, accompagnée de ses complices gothiques. L’Orcanie semble avoir un rôle important dans ce Deuxième Volet, il faudra juger une fois la seconde partie disponible.
L’éléphant au milieu de la pièce, c’est l’absence de Perceval. Choix de l’acteur qui semblait ne pas aimer ce qu’on allait lui faire jouer pour ce volet (et qui a semble-t-il été frustré par le tournage du premier film), cette absence se fait tout de même ressentir même si elle n’est traitée que comme un événement parmi tout ce qui se passe dans le film. Difficile de savoir ce qu’il adviendra du personnage pour la suite, sachant l’importance qui lui était donnée jusqu’ici dans la Grande Histoire, mais également difficile de savoir comment Alexandre Astier a voulu gérer cette absence. D’un côté, le personnage est tout de même présent par des lettres dont la teneur est plutôt typique du personnage qu’on a connu (celui de la série, pas celui qui gueule sans arrêt dans le premier volet…) et qui auraient très bien pu aller dans la bouche de Franck Pitiot. Mais dans le même temps, Karadoc (Jean-Christophe Hembert) et Arthur, destinataires de ces lettres, semblent traiter Perceval avec mépris. Qu’est-ce que l’auteur de la saga fera finalement de son personnage voué à une grande destinée ? Seul l’avenir nous le dira.
Mais il y a aussi des gens qui ne seront de retour que pour la deuxième partie, alors que la conclusion du premier film semblait leur donner une grande importance pour la suite, comme Sting, sans doute avec de grosses contraintes de tournage mais qui pourraient être réduites avec une écriture qui puisse prendre tout ça en compte.
Je ne vais pas dans cette critique revenir sur toutes les sous-intrigues et tous les problèmes que je peux avoir mais pour en finir avec les personnages, parlons tout de même de celui au centre de tout : Arthur Pendragon. Le personnage qui en mode « un pas en avant, un pas en arrière » depuis le Livre V. Car on a une nouvelle fois droit au « leader malgré lui », cet Arthur qui accepte de prendre le pouvoir avant de vouloir le rendre à nouveau et de bouder dans son coin et puis d’accepter mais pas complètement. Difficile de voir une évolution dans le personnage depuis bien longtemps et c’est plutôt frustrant quand on parle du personnage central. Et si les réponses sarcastiques et cinglantes marchent à petite dose, quand on n’a l’impression que le personnage ne parle que comme ça pendant tout le film, ça devient répétitif, même lorsque c’est bien écrit.
Si je ne parle que de choses plutôt négatives depuis le début, tout n’est pas non plus à jeter dans ce film. Et son écriture fait partie des choses à sauver, au moins en partie.
Ce n’est pas l’écriture globale de l’histoire que je sauverais, car même si elle a ses fulgurances par moments, il y a bien trop de choses que je ferais passer à la trappe ou que je résumerais pour sauver l’intrigue dans sa globalité.
Mais il y a une chose qui marche encore bien souvent dans l’écriture d’Astier : les dialogues. Qu’il s’agisse d’échanges entre des personnages, de répliques isolées, de fions envoyés par l’un ou l’autre ou de certains monologues, il garde une certaine science du verbe qui fait souvent mouche. Son habitude d’écrire les personnages en fonction des acteurs qu’il choisit aide aussi à ce que ces textes correspondent bien à la manière dont les uns et les autres vont les faire vivre et dans la majorité des cas, ça reste quand même l’une des réussites du film.
On peut aussi mettre en avant la production visuelle avec des costumes magnifiques (et moins extravagants pour le premier film), de superbes décors (même si on peut regretter que visuellement toutes les citadelles soient isolées et qu’on ne voit jamais les villages qui sont techniquement voisins) mais aussi les effets spéciaux pour les créatures mystiques.
Si Kaamelott a toujours été dans un monde d’héroïc-fantasy, c’est avec ce film qu’on a le plus de preuves visuelles et où l’on nous parle le plus concrètement de démons, de dragons, etc. Peut-être un souffle plus épique sur la fin de l’histoire ?
De même, la musique est encore une fois parfaitement maîtrisée, prenant les devants quand il le faut et sachant se faire discrète aussi, c’est une réussite.
Je vais malgré tout terminer par un dernier reproche, que j’avais déjà à l’époque du premier film mais qui m’a encore plus marqué ici : le film n’a aucun sens de manière temporelle et géographique.
Des trajets immenses (par exemple entre la Carmélide et la Tour de Ban) semblent durer quelques minutes, certains personnages font des aller-retour impressionnants en moins de 24 heures tandis que d’autres se retrouveront à explorer une pièce dans des catacombes sur le même temps qu’il en prendra à un autre groupe pour faire une balade en bateau d’un mois et demi. Ça me sort complètement du film…
Conclusion
Alors oui, cette première partie du second volet de Kaamelott au cinéma est moins pire à mes yeux que le film précédent, mais on n’est toujours pas sur ce que je considère comme étant un bon film, encore plus quand j’ai vraiment le sentiment d’avoir passé plus de 2 heures à regarder un premier acte.
Au moins cette fois-ci, je suis moins déçu, puisque je n’en attendais pas grand chose.
Le fait qu’on passe parfois plus de temps avec certains personnages fait qu’ils sont mieux traités que lors de l’opus de 2021 mais je n’arrive pas à retrouver le plaisir que je peux encore avoir en revoyant les 6 premiers livres, même s’ils comportent leurs faiblesses aussi.
Alors oui, j’irai voir la suite. Déjà parce que je suis entouré de gens qui vont vouloir aller la voir, mais aussi parce que j’ai enfin de savoir comment cette longue saga se conclura (si elle se termine), car c’est un univers qui me tient particulièrement à cœur, sinon je ne passerai pas autant de temps à vous en parler malgré mon ressenti négatif.

